ANTONI PATEK
Vous connaissez les grandes marques de montres de luxe : Rolex, Omega, Breitling, Cartier… Mais connaissez-vous Patek ? Ce nom, c’est vrai, n'évoque pas particulièrement la Pologne et les Polonais. D’ailleurs, le client d'aujourd'hui considère la marque Patek comme une marque historique de la haute horlogerie suisse.
Voyons alors qui est le véritable créateur de cet empire horloger qui fait partie du cercle très fermé des plus anciennes manufactures encore en activité.
Antoni Norbert Patek est né le 14 juin 1812 à Piaski Szlacheckie (un village situé à 70 km au S.-E. de Lublin), dans une famille de petite noblesse. En 1822, celle-ci s’installe à Varsovie. Au décès de son père en 1827, Antoni est contraint de travailler pour subvenir aux besoins de la famille.
À l'âge de 17 ans, il rejoint le 1er régiment de fusiliers à cheval commandé par son demi-frère et, en 1830, il se rallie à l'insurrection de Novembre contre le tsar Nicolas Ier, roi de Pologne, au cours de laquelle, rapidement promu sous-lieutenant, il sera blessé deux fois. En reconnaissance de ses mérites durant les combats, il reçoit en 1831 la Croix d'or de l'ordre Virtuti Militari, la plus haute distinction militaire polonaise.
Après l’échec du soulèvement, il va partager le sort de milliers de militaires polonais qui, pour fuir la répression et la russification de leur pays, vont tenter de rejoindre la France en passant par la Saxe. Il résidera à Bourges et à Cahors. Artistiquement et techniquement doué, c’est à Amiens qu’il finira par exercer le métier de typographe.
La Russie ayant demandé au gouvernement français de ne pas consentir à l’installation des émigrés polonais en France, Patek sera accusé d’activités révolutionnaires et en 1835 il devra quitter le pays. Il partira pour la Suisse et précisément pour Genève où il va s'installer définitivement. Il s’y consacrera d’abord à sa passion pour la peinture en fréquentant la classe privée de dessin de l’illustre peintre paysager suisse Alexandre Calame. Pour payer ses cours, il va essayer de faire commerce en vendant du vin et d’autres boissons spiritueuses. En vain…
Dès lors, il s’intéressera à l’horlogerie. De ces observations, il s’avère convaincu qu’il ne deviendra jamais un horloger professionnel, mais qu’il peut embellir un mécanisme déjà tout fait. Alors, il commence par acheter des mécanismes horlogers à de célèbres maîtres suisses. Ensuite, il décore les boitiers de gravures uniques. Voyant que l'entreprise génère des revenus non négligeables, il investit l'argent qu'il gagne en confiant la décoration des mécanismes et des boîtiers de montres à des miniaturistes, graveurs et émailleurs de renom. Antoni Patek fut donc le créateur de montres qui non seulement donnaient l'heure, mais étaient de véritables œuvres d'art exclusives.
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C’est le 1er mai 1839 qu’il fonde sa première manufacture horlogère, “Patek, Czapek & Cie”, en coopération avec l'émigrant polonais Franciszek Czapek. Ce dernier, qui avait lui aussi participé à l’insurrection de Novembre, a francisé son prénom en François dès son arrivée à Genève en 1832 et avec l'horloger Moreau, avait créé sa première entreprise sous le nom de “Czapek & Moreau”. Quant à Antoni Patek, il épousera la nièce de Moreau en juillet 1839. |
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En 1844, avec Czapek, il se rend à Paris pour présenter ses produits au public français. Il y fait une grande impression sur les Parisiens grâce au caractère artistique unique de ses montres richement décorées de motifs patriotiques et religieux. C'est là que Patek fait la rencontre de l'horloger français Jean Adrien Philippe, un concepteur de montres de gousset qui vient de recevoir à l’Exposition des produits de l'industrie française à Paris une médaille de bronze pour son système innovant qui permet le remontage manuel sans clé. Pressentant tout le potentiel de cette invention, Patek se promet de l’insérer dans ses montres. C’est ainsi qu’en 1845, à l'expiration du contrat avec Czapek, Patek s'associe à Adrien Philippe en l’embauchant comme directeur technique. En 1851, il en devient l'associé et l'un des propriétaires de “Patek, Philippe & Cie”. Il ne faudra pas attendre longtemps pour récolter les fruits de cette coopération. |
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Cette même année, lors de l'Exposition universelle de Londres, le mécanisme innovant et le savoir-faire des montres vont susciter l'intérêt de plus en plus de clients, riches évidemment ! La firme reçoit la médaille d’or. Le modèle unique (avec des roses en diamant sur émail bleu), en forme de broche avec pendentif, sera acheté par la reine britannique Victoria elle-même. En broche, parce que « les gens heureux ne mesurent pas le temps qui passe ». Difficile d’avoir une meilleure publicité ! |
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Depuis 1851, la manufacture est surnommée « l’horloger des rois ». Parmi les propriétaires de montres Patek figureront également Maria Skłodowska-Curie, Piotr Tchaïkovski, Nicolas II, Léon Tolstoï, Albert Einstein, Walt Disney, Pablo Picasso, Richard Wagner, le pape Léon XIII, Duke Ellington, et aujourd’hui : Elton John, Paul McCartney, Brad Pitt, Nicolas Sarkozy… La révolution suivante dans leur entreprise a lieu en 1868, lorsqu'elle va créer l'une des premières montres-bracelets au monde, fabriquée pour la comtesse Koscowicz de Hongrie. Antoni Patek aura donc aussi été un pionnier dans la production de montres pour femmes, une nouveauté au XIXe siècle. |
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Durant toutes ses années passées en exil, Antoni Patek n'a jamais oublié sa patrie et ses compatriotes. On ne peut passer sous silence son patriotisme qui a profondément marqué toute sa vie. Son entreprise a employé volontiers des horlogers arrivés du Royaume de Pologne. En tant que militant de la Grande Émigration, il a su partager sa fortune et n'a jamais oublié ses compagnons d'infortune de l'émigration polonaise. Il a apporté un soutien matériel au mouvement indépendantiste lors du Printemps des peuples et aux réfugiés du pays après l’échec de l’insurrection de Janvier 1863. À son initiative, une institution caritative et d'entraide "Skarbuna Polska" est créée. Il participe aux activités visant à lancer la Bibliothèque et la Salle de lecture polonaises à Genève. Il était également un membre actif de la Société démocratique polonaise et de la Société pour l'éducation nationale des enfants des émigrés polonais. Il coopère avec des organisations catholiques genevoises. Il soutint également la Congrégation de la Résurrection de Notre Seigneur Jésus-Christ, fondée en 1836 à Paris par Bogdan Jański. Pour cet engagement, il reçut du pape Pie IX le titre de comte.
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Antoni Patek décède le 1er mars 1867 à Genève, laissant seul son partenaire français. Il sera inhumé au cimetière de Châtelaine, située sur la rive droite du Rhône. Adrien Philippe fait changer l’enseigne de la maison, pour ajouter une virgule entre les deux noms (virgule qui sera définitivement abandonnée en 2009). Patek savait que la crédibilité des montres reposait d’abord sur le savoir-faire de Philippe. À l’inverse, Philippe n’ignorait pas qu’il manquait de la vision, de l’ambition, du sens des affaires et du carnet d’adresses de Patek. Philippe va décéder le 5 janvier 1894. Il est enterré, lui, sur la rive gauche, au cimetière de Saint-Georges. À vol d’oiseau, moins d’un kilomètre entre les deux hommes. Mais le Rhône les sépare… |
La place de l'insurgé polonais décédé a été prise par son fils - Léon, et le descendant d’Adrien Philippe s'est également impliqué dans les activités de l'entreprise. Finalement, en 1932, elle fut rachetée par Karol et Jean Stern et l'entreprise s'appelle désormais Patek Philippe SA.
*En perpétuelle innovation, Patek Philippe est connue pour être la marque qui a déposé plus de 70 brevets, dont celui du régulateur de précision en 1881, de la première montre de poche avec calendrier perpétuel et chronographe en 1895, du double chronographe en 1902, du mouvement mécanique avec rotor périphérique en 1964 et enfin celui du mécanisme de représentation astronomique en 2000. Instruments de chronométrage de référence, les montres Patek Philippe sont également de purs objets d'art dont la beauté reflète la perfection. On dit que ces montres ont “une âme”…
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*Inauguré en novembre 2001, le Patek Philippe Museum de Genève réunit l’une des plus importantes et prestigieuses collections horlogères au monde. En quelque 2500 montres, automates, objets précieux et portraits miniatures sur émail, il propose un fabuleux voyage à travers cinq siècles d’art horloger genevois, suisse et européen – ainsi qu’un panorama très complet de la production de Patek Philippe depuis 1839. Sans oublier une bibliothèque de plus de 8000 ouvrages en rapport avec la mesure du temps… |
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*À l'occasion du 150e anniversaire de la fondation de l'usine, la montre de poche la plus compliquée au monde est produite. La Patek Philippe Calibre 89, qui pèse plus d'un kilogramme, est composé de 33 mécanismes et de 1728 pièces. La montre en or indique entre autres : les levers et couchers de soleil, la température, les phases de la lune et la date de Pâques. |
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*À noter qu’en 2019, lors d’une vente aux enchères caritative au profit de la recherche contre la maladie de Duchenne, une Patek Philippe Grandmaster Chime en acier a trouvé preneur pour la somme folle de 28 millions d’euros (soit 14 fois son estimation basse de 2 millions d’euros) devenant ainsi la montre la plus chère jamais vendue sous le marteau. Son développement, sa fabrication et son assemblage ont exigé un total impressionnant de 100 000 heures. |
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*L'héritage d'Antoni Patek est encore visible aujourd'hui. Patek Philippe est une marque qui produit encore certaines des montres les plus exclusives et les plus compliquées au monde. La marque crée la surprise en octobre 2024 avec l'annonce d'une nouvelle collection : la Patek Philippe Cubitus (avec bracelet en acier et or rose). |
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Antoni Patek, Polonais du cœur de l'Europe, a créé une marque devenue une icône de l'horlogerie de luxe. Sa détermination, son innovation et son talent horloger ont laissé une marque durable dans l'histoire, et la marque Patek Philippe est la preuve vivante que la passion et le travail acharné peuvent conduire à un succès intemporel. Ses produits sont un symbole d’excellence et de prestige, appréciés par les collectionneurs et les amateurs d’horlogerie du monde entier.
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| Plaque commémorative dans son village natal | Timbre édité en 2009 par la poste polonaise | Plaque commémorative dans son village natal |