Éphéméride polonaise
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15 août15/08/2025
1966 - Décès à Harrison près de New York City de Jan Kiepura, ténor et acteur de renommée mondiale dans la période d’entre-deux-guerres. Il est né le 16 mai 1902 à Sosnowiec. Il passe son baccalauréat au lycée public local. Membre de l'Organisation militaire polonaise. Il participe à la 1e insurrection de Silésie. En 1921, il étudie le droit à l'Université de Varsovie et parallèlement consacre une grande partie de l'argent reçu de ses parents pour des cours de chant. Il fait ses débuts en 1923 lors d'un concert dans la salle du cinéma Sfinks à Sosnowiec, apparaît sur une scène d’opéra pour la première fois en 1924, dans le rôle du Góral (le Montagnard) dans Halka de Stanisław Moniuszko à l'Opéra de Varsovie. Son véritable début à l’opéra aura lieu à Lwów le 15 janvier 1925 - il se produit dans le rôle-titre de Faust de Charles Gounod. Le 22 septembre 1926, lors de ses débuts sur une scène étrangère, il apparaît dans Tosca et Turandot de Giacomo Puccini sur la scène du Staatsoper (opéra d'État) de Vienne. Au cours des trois mois qui vont suivre, il chantera à Berlin, Brno, Prague et Budapest et, en février 1927, au Royal Albert Hall de Londres. En 1928, il fait ses débuts à la Scala de Milan créant le rôle de Calaf dans Turandot de Puccini. Grâce à ces succès, Varsovie va s’intéresser de plus près à Jan Kiepura. Ses venues en Pologne font sensation et ses représentations suscitent des explosions spontanées d’enthousiasme. C’est le début d’une grande la carrière pour l’artiste qui triomphera également sur d’autres scènes d'opéra dans le monde, comme le Staatsoper à Berlin, l'Opéra-Comique à Paris, le Covent Garden à Londres, le Teatro Colón à Buenos Aires. Le 10 février 1938, il fait ses débuts au Metropolitan Opera de New York, en y interprétant tour à tour les rôles de Rodolfo dans La Bohème de G. Puccini, de Don José dans Carmen de Georges Bizet et du duc de Mantoue dans Rigoletto de Giuseppe Verdi, dont le rôle est considéré comme la création d’opéra la plus brillante du chanteur. Après le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale en 1939 et la décision des gouvernements de Pologne et de France de former une armée polonaise en France, Jan Kiepura s’engage comme volontaire et vient à Lille pour soutenir les émigrés polonais. En 1944, avec sa femme épousée en 1937, la chanteuse et actrice viennoise d'origine hongroise Marta Eggerth, tous deux vont se produire durant toute l’année à Broadway dans La Veuve joyeuse de Ferenc Lehár, rencontrant un succès extraordinaire ; avec cette opérette, ils se rendront dans d'autres villes des États-Unis puis, après la guerre, en Angleterre, en France, en Italie et en Allemagne (chantant en quatre langues). En 1958 et 1959, Kiepura se rend en Pologne et donne des concerts, entre autres à Varsovie et Cracovie. Déjà en 1930, il avait commencé à travailler avec des studios de cinéma tout d’abord allemands et plus tard américains et européens. La liste des films auxquels il a prêté sa participation étant importante, voici les plus populaires : “La ville chantante” (1930, de Carmine Gallone), “La chanson d’une nuit” (1932, d’Anatole Litvak), “J'aime toutes les femmes” (1935, de Karel Lamač), “La magie de la Bohême” (1937, de Géza von Bolváry) et “Le pays du sourire” (1952, de Hans Deppe et Erik Ode, Berlin-Ouest). Dans presque chaque film, il a interprété une chanson en polonais. Doté d'une voix d'une grande puissance et dans le même temps d’une subtilité extraordinaire, il aura été l'un des plus grands maîtres de la technique vocale du XXe siècle. Plus de 200 000 Varsoviens se presseront le long de son dernier voyage menant du Teatr Wielki (Grand Théâtre) au cimetière de Powązki. Avec l'argent gagné sur les scènes du monde entier dans la période de l’entre-deux-guerres, il avait fait bâtir à Krynica-Zdrój sa villa “Patria” pour la somme de trois millions de dollars - lieu de tournage de plusieurs films dans les années 30. Depuis 1967, chaque année a lieu à Krynica-Zdrój le Festival Européen Jan Kiepura. ‹LS›
Brunetki, blondynki. (Brunettes, blondes)
14 août14/08/20251944 - Début de l’opération “Tractable”, deuxième phase de la bataille de Normandie : les soldats polonais et canadiens vont renouveler leurs attaques contre les positions ennemies.
Quelques jours seulement après avoir débarqué entre Arromanches et Courseulles-sur-Mer, en Normandie, la 1e division blindée* du général Stanisław Maczek, rattachée au 2e Corps canadien, avait dès le 8 août participé à l'offensive alliée “Totalize” en lançant une première attaque sur Falaise afin d'encercler les troupes allemandes qui s'y trouvaient. Avant même le début de l’attaque, les arrières de la division furent touchés par erreur par le bombardement aérien américain qui occasionna plusieurs dizaines de morts et de blessés.
Malgré la nature féroce des combats, l'attaque des troupes polonaises n'aura cependant pas apporté les résultats escomptés, même si elle leur aura permis de gagner du terrain.
Pour l’opération “Tractable”, le général Maczek a partagé sa division en deux groupes qui opéreront une percée décisive et prendront Chambois (effectuant ainsi une jonction avec les Américains) et le mont Ormel (cote 262, appelée par le général Maczek : “Maczuga/Massue”) qui leur permettait de bloquer la voie d'évacuation aux Allemands. Ne voulant pas permettre l'encerclement, ces derniers vont attaquer les Polonais dans l'espoir de percer leurs lignes. Durant trois jours, leurs contre-attaques vont se succéder avec acharnement, mettant en péril les lignes défensives polonaises. Cela permettra à certaines unités allemandes de sortir du chaudron. Des détachements parachutistes allemands vont même s'élancer pour des attaques à la baïonnette, mais se heurteront à la défense têtue des Polonais, isolés sur le mont Ormel, qui les affronteront à l'arme blanche ! Le 21 août, les troupes canadiennes soulageront les rescapés polonais qui se battaient pour la “Maczuga”. Ils tombèrent sur les scènes d’une tragédie effroyable. Par endroits, des soldats polonais et allemands gisaient côte à côte, la mort les ayant unis dans un ultime corps à corps à l’arme blanche. La poche de Falaise était définitivement fermée. La victoire était acquise. Mais à quel prix ! Les Polonais auront eu 325 tués, 114 disparus, environ un millier de blessés ! Ils auront fait plus de 5 000 prisonniers de guerre. Les pertes matérielles allemandes vont s’élever à plus de 400 chars, 7 000 autres véhicules et près d'un millier de canons.
C'est à l'effort des soldats polonais à Falaise que le général Bernard Law Montgomery, commandant en chef du 21e groupe d'armées britannique participant au débarquement en Normandie, avait à l’esprit quand il a dit : “Les Allemands étaient comme dans une bouteille dont la division polonaise était le bouchon avec lequel on les avait enfermés”.
“Vos combats entreront dans l'histoire. Votre sacrifice contribuera à établir les droits de la Pologne sur une base indestructible”, a écrit le commandant en chef, le général Kazimierz Sosnkowski, dans l'ordre du 23 août adressé aux soldats polonais.
Quelques jours après la défaite des Allemands, les Alliés entreront à Paris (25 août), où ils organiseront un défilé solennel sur les Champs-Élysées. Fin septembre, les forces alliées vont libérer tout le pays - à l’exception de quelques ports fortifiés sur la côte atlantique et les îles anglo-normandes, détenus par les Allemands jusqu'à la reddition du Troisième Reich.
“La division devenait un monolithe composé de soldats qui, sur la base d'une expérience sanglante et difficile, ont acquis l'estime de soi et pris conscience de leurs propres capacités. Ce fut absolument nécessaire. Pour la division, Falaise n'était pas la fin, mais le début d'une nouvelle campagne”, écrivit plus tard le général Skibiński.
En effet, après les succès en France (dont la libération d’Abbeville, de Hesdin, de Saint-Omer), la division polonaise va libérer des villes de Belgique et des Pays-Bas aux côtés des alliés. Les populations locales vont les accueillir comme des héros ; dans les vitrines de nombreuses villes, apparaîtront les inscriptions “Polonais, on vous remercie !”
Le parcours de guerre de la division du général Maczek se terminera le 5 mai 1945 avec la prise de la base navale allemande de Wilhelmshaven.
La 1e division blindée a pris part aux combats sur le front occidental pendant un total de 283 jours, subissant les pertes de plus de 5 100 soldats tués et blessés. Pendant toute la campagne, la division a fait plus de 52 000 soldats allemands prisonniers.
Aujourd’hui, sur la côte 262 du mont Ormel, un mémorial très émouvant rend hommage aux troupes polonaises et à son chef le général Maczek. ‹LS›
*La 1e division blindée, qui faisait partie des forces alliées et qui a poursuivi les traditions de la 10e brigade de cavalerie motorisée combattant durant la campagne de 1939, a été formée en Grande-Bretagne le 25 février 1942 par ordre du commandant en chef, le général Władysław Sikorski.